Dans la campagne du Pays de Mormal, de Jenlain à Landrecies, les disparités entres riches et pauvres sont fortes. Derrière les chiffres, des histoires et des similitudes ont été relevées au cours d’une enquête menée lors du premier semestre par le cabinet Exaeco. Voici les grandes lignes.
Le mal-logement
L’habitat, c’est le nerf de la guerre dans la lutte contre la pauvreté. Car dans le Pays de Mormal, où 73 % des habitants sont propriétaires de leur bien (contre 58 % dans le département), 25 % des logements datent d’avant 1919. Ce qui crée une situation atypique : « des gens sont propriétaires d’un bien dans lequel ils vivent mal et où se chauffer devient optionnel », relate Yoan Lecerf, maire de La Flamengrie. Les maisons ne sont pas toutes aux normes et les rénover est coûteux.
Et le Pays de Mormal n’échappe pas à la crise du logement. « Ici, les jeunes primo travailleurs ne peuvent pas se loger », regrette le maire de La Flamengrie. Ce qui peut, en partie, expliquer pourquoi la part d’habitants entre 20 et 30 ans est bien plus faible qu’ailleurs dans le Nord.
La pauvreté invisible
Le diagnostic met à mal l’importance de l’entraide dans les villages, cette idée reçue où chacun prend des nouvelles de son voisin. « Il ne faut pas oublier la pression sociale, on n’a pas envie que le voisin sache qu’on va chercher des bons alimentaires, constate Yoan Lecerf. La misère à deux maisons de la sienne, on ne la voit pas. Et les gens souffrent en silence. » Lui estime que « la pauvreté isole, et quand on sort moins, on parle moins ».
L’entraide entre voisins, difficile à faire ressortir dans un rapport, existe toujours. Mais « si elle crée des amortisseurs, cela ne suffit pas », note Natacha Yvon, du cabinet Exaeco.
Face à cela, celui qui est devenu maire de son village en 2020 estime que c’est aux administrations de recréer du lien social : « Il faut favoriser les échanges dans le village et cette solidarité qui a disparu. Et quand les gens se connaissent, ils identifient plus facilement quand ça ne va pas. »
Les difficultés à se déplacer
Que ce soit pour l’emploi ou pour trouver un médecin, le Pays de Mormal est dans la moyenne des statistiques nationales. Pourtant, ceux qui y vivent sont majoritairement obligés de prendre la route pour aller se soigner ou au travail. Ainsi, 86 % des habitants du Pays de Mormal vont travailler en voiture. Problème, le parc automobile y est « dégradé », selon les retours des habitants évoqués dans le rapport d’Exaeco.
Et sans voiture, aller chercher de l’aide auprès des associations devient difficile. Par exemple, le seul centre des Restos du Cœur du Bavaisis se situe au hameau des Lanières, à La Longueville. Rapprocher les associations aidant celles et ceux dans le besoin des bassins de population n’est pas un exercice facile. « Les communes sont assez frileuses à l’idée d’installer à un endroit facile d’accès, donc visible, des structures associatives », ajoute Yoan Lecerf.
Soixante sources de données étudiées, 34 habitants rencontrés ainsi que 25 structures du territoire, allant des clubs sportifs aux associations : le cabinet a pris son bâton de pèlerin pour comprendre la précarité dans le Pays de Mormal.
Présenté en juillet, ce dossier n’a pas vocation à se retrouver au fond d’un tiroir. « L’idée est de faire sur chaque thématique un groupe de travail », promet Yoann Lecerf. Et de mettre sur pied « une force d’action beaucoup plus importante à l’échelle de l’arrondissement ».
Les solutions au mal-logement ou aux difficultés de déplacement existent déjà, alors « autant ne pas réinventer la poudre », estime-t-on du côté d’Exaeco. Neuf défis sont ainsi ressortis de ce semestre d’études, comme « cartographier les ressources locales » pour savoir où se rendre en cas de besoin, « accompagner l’accès au logement » ou encore « créer les conditions pour oser sortir de son espace social territorial ».
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